Le ministre des Affaires culturelles André Malraux prend le premier la parole.
" Mon général, au nom de ceux qui sont en face de vous, je veux vous dire les raisons fondamentales de travail d'un certain nombre de vocations qui vous entourent. Ils ne sont pas venus ici pour entendre parler de loisirs mais pour aider ces vocations dans l'ordre de l'esprit, car dans ces temps qui prennent l'homme hors du travail et qu'il faut bien appeler loisirs, il faut admettre l'existence de ces immenses usines de rêves. Celles-ci ont appelé les hommes à quelque chose q'ils ne connaissent pas, qui les prend à partir de ces moments de loisirs, quand ils sont en proie aux vieilles puissances démoniaques du monde : le sang, la sexualité et la nuit. Mais en face de la mort, on a compris qu'il n'y avait que l'immortalité de l'esprit. Pour des raisons mystérieuses, ceux qui sont ici ont compris que, tantôt avec la douleur, tantôt avec le rire, ils réapprenaient ce qui avait survécu avec les siècles. Ces raisons les ont guidés devant vous, je tenais à vous le dire en leur nom. [...]"
Le général de Gaulle conclut.
"Sous l'impression profonde des paroles que vient de prononcer André Malraux, qui est un des hommes depuis tous les temps qui est le plus qualifié sans doute pour réunir, pour faire un ensemble de ce que sont les diverses branches de la culture, sous cette impression, je veux dire bien simplement combien je me félicite d'être venu constater la réussite que représente cette maison. Elle a été faite, je le sais, je le vois, grâce à des initiatives autant que grâce à des volontés et grâce à des certitudes. Je les ai vues à l'échelon national, à l'échelon de la ville et aussi à l'échelon de toutes nos provinces, qui commencent, à l'exemple de cette maison, à vouloir en posséder autant.
La culture, dans notre monde moderne, ce n'est pas seulement un refuge et une consolation au milieu d'un temps qui est essentiellement mécanique, matérialiste et précipité. C'est aussi la condition de notre civilisation, parce que, si moderne qu'elle puisse être, et plus moderne encore qu'elle doive être, c'est toujours l'esprit qui la commandera. L'esprit, c'est-à-dire la pensée, le sentiment, la recherche et les contacts entre les hommes. C'est pourquoi, encore une fois, la culture domine tout. Elle est la condition sine qua non de notre civilisation d'aujourd'hui, comme elle le fut des civilisations qui ont précédé celle-là.
Et je me félicite encore une fois d'être venu parmi vous. J'en emporterai d'abord au point de vue général le sentiment d'une création et l'évidence d'une innovation, par conséquent quelque chose d'émouvant et d'encourageant en particulier.
Bien entendu, j'ai retiré aussi quelques conclusions pratiques sur ce qu'il y a lieu que l'Etat continue de faire pour la culture française en général et pour cette maison de la Culture en particulier. Nous devons en créer d'autres. Un certain nombre était prévu par le IVe Plan, d'autres le seront par notre Ve Plan. Il faut faire aussi, sans doute, un centre national de diffusion culturelle, pour que tout ce dont nous disposons puisse se répandre et être connu par le plus grand nombre d'hommes et de femmes de chez nous. Il faudra aussi un centre de formation de nos animateurs de plus en plus complet et de plus en plus efficace. Et cela, je suis convaincu que le ministre d'Etat chargé des Affaires culturelles est l'homme le plus qualifié pour le faire, comme j'ai dit tout à l'heure qu'il était le plus qualifié pour comprendre, pour vouloir et pour faire connaître ce qui est l'esprit humain.
Je vous remercie."